05 Oct 2017
Une vraie détermination est nécessaire face à la frilosité des partis traditionnels et leurs tentatives d'enfumage. Voici les mesures que propose le PTB, des mesures fortes et ciblées attaquant de front la culture de la cupidité du monde politique.
Suite aux scandales KazakhGate, Publifin, Telenet, etc., les partis traditionnels semblent miser sur l'amenuisement de l'émotion et de la vigilance populaires pour restreindre sérieusement les réformes nécessaires.
Les partis de la majorité fédérale s'opposent déjà tous à la transparence sur le montant des mandats privés des hommes et femmes politiques (probablement suite à un accord interne).
On constate également des manœuvres de diversion consistant à étendre au maximum le champ du renouveau politique afin de « noyer le poisson ».
Pour le PTB, il faut des mesures fortes et ciblées attaquant de front la culture de la cupidité du monde politique, en agissant essentiellement selon trois axes : la transparence des rémunérations et patrimoines, la réduction des revenus du monde politique et l'évitement des conflits d'intérêts.
1er axe – Revenus des mandataires politiques
Proposition 1 – Réduire et plafonner les revenus des mandataires politiques
Proposition 2 – Supprimer les privilèges en matière de pension
2e axe – Transparence
Proposition 3 – Publicité des rémunérations des mandats publics et privés
Proposition 4 – Publier les patrimoines des mandataires politiques
Proposition 5 – Créer une Haute autorité de la transparence politique
Proposition 6 – Publier sur internet toute délibération d'instances publiques
Proposition 7 – Publier la liste des collaborateurs des cabinets
3e axe – Évitement des conflits d'intérêts
Proposition 8 – Interdire le cumul de mandats publics et privés
Proposition 9 – Combattre le phénomène des « portes tournantes »
Autres propositions du PTB
Proposition 10 – Interdire certains cumuls de mandats publics
Proposition 11 – Réduire le nombre de collaborateurs des cabinets
Tentatives d'enfumage et propositions dangereuses
La transparence à la mode N-VA
L'idée antidémocratique de réduire le nombre de députés à la Chambre
1er axe – Revenus des mandataires politiques
Proposition 1 – Réduire et plafonner les revenus des mandataires politiques
Les grands montants des rémunérations actuelles des mandataires politiques fait qu'ils sont en décalage avec ce que vit la grande majorité de la population. Il est trop facile de décider de mesures qui font mal financièrement au citoyen si on ne les ressent pas soi-même en raison d'une rémunération trop importante.
Un Courrier hebdomadaire du CRISP (n° 2303) sur le profil des parlementaires francophones en 2015 constate que « du point de vue de la démocratie, un problème de fond demeure posé : la surreprésentation de certains milieux dans les assemblées et la sous-représentation, voire l’absence totale, d’autres segments de la société. Il y a là matière à discussions et à polémiques. »
Le CRISP cite le syndicaliste Michel Meyer, président de la Centrale générale des services publics (CGSP, FGTB) : « Comptez un peu le nombre d’élus dans le monde ouvrier. Pas un seul. Le monde syndical n’est plus représenté par les partis politiques au Parlement. Le seul qui soit parvenu à fédérer est allé chercher des candidats chez les syndicalistes, c’est le PTB. Chez tous les autres, ce sont des docteurs, des juristes qui siègent (...). C’est la fracture entre ceux qui travaillent tous les jours, ramassent les poubelles, mettent les voies, les agents pénitentiaires et ces gens-là. Quand vous êtes assis au Sénat et que quelqu’un de ganté de blanc vous sert le café, c’est autre chose que de travailler, par 30 degrés, pour ramasser les poubelles ».
Le PTB propose donc de réduire les rémunérations des parlementaires et de fixer un plafond.
Salaire médian
Applicable à
x 1
Parlementaires du PTB
x 2
Parlementaires des autres partis
X 3
Plafond
1) Indépendamment de toute règle légale, les parlementaires PTB vivent avec le salaire qu'ils avaient avant leur élection (règle interne au parti). Cela représente plus ou moins l'équivalent du salaire médian (3 000 euros brut par mois).
2) Pour les parlementaires en général, la rémunération légale serait de 6 000 euros bruts par mois, ce qui correspond pour un isolé à environ 3 200 euros nets. Ce montant net correspond à un peu plus de la moitié de l'indemnité actuelle d'un parlementaire.
Précisons que les fonctions parlementaires spéciales (président ou vice-président de l'assemblée, président de commission, chef de groupe, etc.) ne feraient pas l'objet d'une rémunération supplémentaire ou alors d'un supplément modéré (par exemple 10 %).
3) Les ministres et les mandataires politiques exerçant plusieurs mandats, publics ou privés, ne pourraient en aucun cas dépasser le plafond de trois fois le salaire médian, soit 9 000 euros bruts par mois. Pour un isolé, cela représente environ 4 500 euros nets, soit un peu moins de la moitié de ce que gagne un ministre actuellement (autour de 10 000 euros nets).
NB : ces dispositions sont reprises dans une proposition de loi du PTB actuellement en cours de traitement par les services de la Chambre.
Proposition 2 – Supprimer les privilèges en matière de pension
À l'occasion des différentes attaques gouvernementales contre les pensions et prépensions, dont le relèvement de l'âge de la pension à 67 ans, le PTB n'a cessé de dénoncer l’attitude « faites ce que je dis, pas ce que je fais » des parlementaires et des ministres, qui disposent d'un système particulièrement avantageux en la matière. Le Premier ministre Charles Michel, par exemple, peut prendre sa pension à 55 ans, sur base d'une carrière complète de 20 ans.
2e axe – Transparence
Proposition 3 – Publicité des rémunérations des mandats publics et privés
Pour l'instant, la loi oblige les mandataires publics à communiquer à la Cour des comptes la liste de leur mandats publics et privés en mentionnant simplement s'ils sont rémunérés ou non.
Pour le PTB, la rémunération annuelle de chaque mandat rémunéré, public comme privé, doit être communiquée à la Cour de comptes et celle-ci doit la publier sur son site internet. Il est essentiel que les mandats privés soient visés : tant au Nord du pays (Bracke-Telenet), qu'au centre (De Decker-Chodiev) ou au Sud (Moreau-Nethys), les rémunérations au cœur du scandale provenaient de mandats privés (ou d'une société privée à capitaux publics dans le cas de Nethys).
Pourtant, la publication des rémunérations des mandats privés, défendue par le PTB, est loin d'être partagée par tous les partis. Selon ce qui ressort du groupe de travail « Renouveau politique » de la Chambre, si les partis d'opposition sont partagés sur la question, les quatre partis de la majorité s'opposent comme un seul homme à la transparence du montant des mandats privés. Cela semble confirmer un bruit qui courait : la majorité se serait déjà accordé sur les propositions à accepter ou – surtout – à rejeter.
NB : ces dispositions sont reprises dans les propositions de loi n° 2327 et 2328 du PTB (23/2/2017).
Proposition 4 – Publier les patrimoines des mandataires politiques
Outre la déclaration de mandats, la loi oblige les mandataires politiques à communiquer à la Cour des comptes les éléments de leur patrimoine (immeubles, numéro des comptes bancaires, etc.) mais sous enveloppe fermée et sans mentionner leur valeur.
Pour le PTB, il est essentiel de publier le patrimoine des mandataires politiques. Ceux-ci devraient fournir les éléments valorisés de leur patrimoine à la Cour des comptes qui les publierait annuellement sur son site internet. Cette transparence est nécessaire pour prévenir des phénomènes comme la dissimulation de revenus illicites ou immoraux, les conflits d'intérêts, les délits d'initiés, la corruption. Comme il existe un lien comptable entre les revenus et le patrimoine, le contrôle de l'un et de l'autre se renforcent mutuellement : ce sont les deux facettes d'une même transparence.
Dans son dernier rapport (21/10/2016), le Groupe d’États contre la corruption (Greco, qui dépend du Conseil de l'Europe), reproche à la Belgique de n'avoir mis en œuvre nombre de ses recommandations, dont la recommandation iii, qui suggère « que le régime des déclarations inclue clairement les revenus, les divers éléments de patrimoine et une estimation de leur valeur - quelle que soit leur forme (y compris ceux détenus directement ou indirectement, en Belgique comme à l’étranger) ainsi que les éléments de passif, avec une actualisation des informations en cours de mandat. »
La France, après l'affaire Cahuzac, a mis en place un tel mécanisme de publicité des patrimoines, qui concerne les ministres, les membres de leur cabinet, les parlementaires et encore d'autres catégories de mandataires politiques.
En Belgique, le PTB est pourtant le seul parti à défendre cette proposition. Au sein du groupe de travail « Renouveau politique » de la Chambre, les autres partis se sont soit exprimés explicitement contre, soit se sont abstenus de prendre position.
NB : ces dispositions sont reprises dans les propositions de loi n° 950 et 951 du PTB (11/3/2015).
Proposition 5 – Créer une Haute autorité de la transparence politique
S'inspirant de ce qui existe au niveau de la municipalité de Barcelone, mais également de ce qui a été mis en place en France après l'affaire Cahuzac, le PTB propose la création d'une Haute autorité de la transparence et de la bonne gouvernance. Elle aurait en son sein un comité consultatif composé de représentants de la société civile et des syndicats.
Cette Haute autorité aurait les missions suivantes :
contrôler activement les instances politiques et l'administration en matière de transparence, de bonne gouvernance et d'évitement des conflits d'intérêts ;
émettre des avis aux Parlements quant à d’éventuelles améliorations ;
recueillir les plaintes anonymes des citoyens, d’organisations de la société civile et de fonctionnaires dénonçant des dysfonctionnements (mauvaise gouvernance, abus, conflits d'intérêts, corruption, etc.) ;
en cas de besoin, mener une enquête et, le cas échéant, dénoncer les faits au parquet.
Proposition 6 – Publier sur internet toute délibération d'instances publiques
Pour le PTB, la transparence implique que la population puisse être au courant de toutes les délibérations et décisions des instances publiques, tant les organes politiques que les entreprises à capitaux publics. Les comptes-rendus de leurs réunions doivent être automatiquement accessibles à tous, en particulier via leur publication sur internet. Pour toutes les instances dont les décisions concernent un nombre important de personnes, les réunions doivent pouvoir être suivies en ligne et en direct.
Proposition 7 – Publier la liste des collaborateurs des cabinets
Des situations récentes ont encore montré de potentiels conflits d'intérêts dans plusieurs cabinets de l'actuel gouvernement fédéral, notamment ceux de la ministre de l’Énergie et du ministre des Finances.
Pour le PTB, les gouvernements doivent publier et tenir à jour, sur leur site internet, la liste de tous les collaborateurs, fixes ou occasionnels, des cabinets ministériels. La liste doit préciser pour chaque collaborateur, les mandats et professions exercés au cours des cinq années précédentes.
3e axe – Évitement des conflits d'intérêts
Proposition 8 – Interdire le cumul de mandats publics et privés
De récentes affaires ont montré que plusieurs parlementaires, dont le président de la Chambre, avaient une fonction de conseiller pour la multinationale Telenet, alors qu'ils sont amenés à voter des lois relatives au secteur des télécoms ou à l'entreprise publique Proximus, concurrente de Telenet. Même un ancien Premier ministre a, durant son mandat, été lié par contrat avec Telenet.
De telles situations sont inacceptables en termes d'évitement de potentiels conflits d'intérêts. Il ne s'agit pas, bien sûr, d'empêcher qu'un dirigeant d'une PME familiale puisse être parlementaire. Il serait même souhaitable que des travailleurs salariés ou indépendants puissent combiner une activité professionnelle à temps partiels avec un mandat de parlementaire, de manière à rester en contact avec les réalités de la vie active. Il faut par contre interdire tout mandat ou contrat d'un mandataire politique avec des banques, multinationales et sociétés cotées en Bourse.
NB : ces dispositions sont reprises dans une proposition de loi du PTB actuellement en cours de traitement dans les services de la Chambre.
Proposition 9 – Combattre le phénomène des « portes tournantes »
Un autre phénomène pose problème en matière de conflits d'intérêts, celui des « portes tournantes » : ces individus qui passent successivement du monde politique au monde des affaires. Plusieurs anciens Premiers ministres belges ont suivi cette voie douteuse…
Pour le PTB, dans les cinq années suivant l'exercice d'un mandat public, le mandataire ne peut accepter de mandat (ou autres relations) avec des banques, multinationales et sociétés cotées en Bourse.
NB : ces dispositions sont reprises dans une proposition de loi du PTB actuellement en cours de traitement dans les services de la Chambre.
Autres propositions du PTB
En dehors des trois axes qui précèdent, le programme du PTB contient une série de propositions de réforme en matière de gouvernance. Ces réformes ont évidemment toute leur utilité, mais le PTB estime qu'elles sortent du cadre des mesures prioritaires à prendre pour répondre aux récents scandales. Voici deux propositions qui, tout en étant hors des trois axes, ne s'éloignent pas trop du cadre.
Proposition 10 – Interdire certains cumuls de mandats publics
Outre le décumul financier (voir proposition 6), le PTB propose un décumul fonctionnel : le mandat de député (national ou régional) ne devrait pas pouvoir être cumulé à une fonction exécutive au niveau communal (échevin ou bourgmestre). Un tel cumul pose en effet un double problème : le manque de temps consacré aux différents mandats (diriger une ville ne peut se faire à temps partiel) et le mélange de fonctions législatives et exécutives.
Par contre, le PTB défend la possibilité de continuer à exercer un emploi de travailleur, à temps partiel, à côté de sa fonction de député. S'opposant à la conception de « politiciens professionnels », le parti de gauche estime qu'un parlementaire doit avoir du temps pour être au contact de la réalité et non être enfermé dans la tour d'ivoire du Parlement.
Proposition 11 – Réduire le nombre de collaborateurs des cabinets
Le PTB constate une évolution néfaste dans laquelle les cabinets ministériels prennent de l'ampleur et recourent également de plus en plus à des consultants, au détriment du recours à l'administration. On se souvient par exemple de la polémique ayant mis en cause l'ancienne ministre Jacqueline Galant, laquelle avait fait rédiger un projet de loi par le cabinet d'avocats Clifford Chance pour un montant astronomique et un travail bâclé, tandis que, fort de son expertise, le SPF Mobilité aurait réalisé un bien meilleur travail et sans surcoût.
Le parti de gauche propose donc une réduction à la fois du nombre de collaborateurs des cabinets et du recours à des consultants.
Tentatives d'enfumage et propositions dangereuses
La transparence à la mode N-VA
La Chambre a décidé de créer un groupe de travail chargé de chercher des consensus sur des dispositions de renouveau politique qui devront être ensuite coulées en propositions de loi. Lors de la première discussion de ce groupe, sur le thème de la transparence, l'attitude de la N-VA était assez révélatrice. Elle est venue avec pas moins de sept propositions sur ce seul thème, contenant toutefois beaucoup de points périphériques et peu d'avancées sur le fond. Proposer, par exemple, que les politiciens puissent rentrer leur déclaration de mandats par voie électronique, c'est sans doute une bonne idée sur le plan pratique, mais on cherche toujours le rapport avec la transparence.
Par contre, dès qu'il s'agit de toucher le noyau dur de la transparence, la N-VA exprime une frilosité qui montre à quel point ce parti, si prompt à dénoncer les partis traditionnels, s'est déjà lui-même rangé, dans les faits, dans cette catégorie (ce que montrent d'ailleurs aussi l'affaire Bracke ou les conflits d'intérêts au cabinet du ministre Van Overtveldt). Ainsi, la N-VA, sans fournir d'argument, s'oppose partiellement à la transparence des rémunérations des mandats publics (elle veut seulement que l'on donne une fourchette de revenu), s'oppose totalement à la transparence des rémunérations dans mandats privés et est violemment allergique à la transparence sur le patrimoine des mandataires.
Comme cette peur de la transparence est partagée par la plupart des autres partis traditionnels, on peut craindre que le groupe de travail « Renouveau politique » se transforme en opération d’encommissionnement, misant sur l'amenuisement de l'émotion et de la vigilance populaires pour rendre en juillet, en pleine période de vacances, quelques timides mesures sans lien avec l'ambition affichée au départ.
L'idée antidémocratique de réduire le nombre de députés à la Chambre
S'il y a bien un parti qui a toujours dénoncé la multiplication des instances exécutives et législatives, suite aux réformes institutionnelles à répétition, qui organisent le repli des régions et communautés sur elles-mêmes au détriment de la solidarité, c'est le PTB, seule formation unitaire du champ politique belge.
Cependant, certains responsables politiques tentent de détourner le débat sur le niveau de salaires des mandataires en l'entraînant sur celui du nombre de mandataires. La ficelle est un peu grosse, mais c'est pourtant ce qu'a fait le Premier ministre Charles Michel, le 16 février dernier, dans sa réponse au député PTB Raoul Hedebouw qui, en séance plénière de la Chambre, l’interrogeait sur la culture de la cupidité du monde politique. Charles Michel : « N'y a-t-il pas dans notre pays beaucoup de ministres, beaucoup de mandataires ? Peut-être devons-nous mettre cette question de la rémunération en lien avec le nombre très élevé de fonctions politiques et de fonctions publiques ? ».
Six jours plus tard, le député libéral Vincent Van Quickenborne (Open Vld) concrétisait l'idée du Premier ministre en affirmant que la Chambre pourrait « se tenir avec cinquante collègues en moins. » Après le « moins de fonctionnaires mais mieux payés » de Nicolas Sarkozy, va-t-on bientôt assister au credo « moins de parlementaires mais mieux payés » de la droite belge ? Non seulement il s'agit d'un écran de fumée pour tenter de réduire le problème de la culture de la cupidité du monde politique à une simple question d'ordre budgétaire, mais, en plus, une telle proposition est foncièrement antidémocratique, puisqu'elle conduirait à renforcer le poids des grands partis traditionnels à la base des scandales et à empêcher l'émergence de petits partis qui pourraient menacer le ronron de leurs mauvaises pratiques.
Une Chambre de 100 députés au lieu de 150, augmenterait en effet le seuil pour obtenir un siège. Ce seuil dépasserait partout les 5 %, même dans les provinces envoyant le plus de députés à la Chambre. Et, dans une province comme le Limbourg, il faudrait pratiquement 9 % des voix pour obtenir un élu. Dans les provinces du Luxembourg ou du Brabant wallon, ce seuil dépasserait même les 20 %.
A lire sur ptb.be (04/04/2017)
Suite aux scandales KazakhGate, Publifin, Telenet, etc., les partis traditionnels semblent miser sur l'amenuisement de l'émotion et de la vigilance populaires pour restreindre sérieusement les réformes nécessaires.
Les partis de la majorité fédérale s'opposent déjà tous à la transparence sur le montant des mandats privés des hommes et femmes politiques (probablement suite à un accord interne).
On constate également des manœuvres de diversion consistant à étendre au maximum le champ du renouveau politique afin de « noyer le poisson ».
Pour le PTB, il faut des mesures fortes et ciblées attaquant de front la culture de la cupidité du monde politique, en agissant essentiellement selon trois axes : la transparence des rémunérations et patrimoines, la réduction des revenus du monde politique et l'évitement des conflits d'intérêts.
1er axe – Revenus des mandataires politiques
Proposition 1 – Réduire et plafonner les revenus des mandataires politiques
Proposition 2 – Supprimer les privilèges en matière de pension
2e axe – Transparence
Proposition 3 – Publicité des rémunérations des mandats publics et privés
Proposition 4 – Publier les patrimoines des mandataires politiques
Proposition 5 – Créer une Haute autorité de la transparence politique
Proposition 6 – Publier sur internet toute délibération d'instances publiques
Proposition 7 – Publier la liste des collaborateurs des cabinets
3e axe – Évitement des conflits d'intérêts
Proposition 8 – Interdire le cumul de mandats publics et privés
Proposition 9 – Combattre le phénomène des « portes tournantes »
Autres propositions du PTB
Proposition 10 – Interdire certains cumuls de mandats publics
Proposition 11 – Réduire le nombre de collaborateurs des cabinets
Tentatives d'enfumage et propositions dangereuses
La transparence à la mode N-VA
L'idée antidémocratique de réduire le nombre de députés à la Chambre
1er axe – Revenus des mandataires politiques
Proposition 1 – Réduire et plafonner les revenus des mandataires politiques
Les grands montants des rémunérations actuelles des mandataires politiques fait qu'ils sont en décalage avec ce que vit la grande majorité de la population. Il est trop facile de décider de mesures qui font mal financièrement au citoyen si on ne les ressent pas soi-même en raison d'une rémunération trop importante.
Un Courrier hebdomadaire du CRISP (n° 2303) sur le profil des parlementaires francophones en 2015 constate que « du point de vue de la démocratie, un problème de fond demeure posé : la surreprésentation de certains milieux dans les assemblées et la sous-représentation, voire l’absence totale, d’autres segments de la société. Il y a là matière à discussions et à polémiques. »
Le CRISP cite le syndicaliste Michel Meyer, président de la Centrale générale des services publics (CGSP, FGTB) : « Comptez un peu le nombre d’élus dans le monde ouvrier. Pas un seul. Le monde syndical n’est plus représenté par les partis politiques au Parlement. Le seul qui soit parvenu à fédérer est allé chercher des candidats chez les syndicalistes, c’est le PTB. Chez tous les autres, ce sont des docteurs, des juristes qui siègent (...). C’est la fracture entre ceux qui travaillent tous les jours, ramassent les poubelles, mettent les voies, les agents pénitentiaires et ces gens-là. Quand vous êtes assis au Sénat et que quelqu’un de ganté de blanc vous sert le café, c’est autre chose que de travailler, par 30 degrés, pour ramasser les poubelles ».
Le PTB propose donc de réduire les rémunérations des parlementaires et de fixer un plafond.
Salaire médian
Applicable à
x 1
Parlementaires du PTB
x 2
Parlementaires des autres partis
X 3
Plafond
1) Indépendamment de toute règle légale, les parlementaires PTB vivent avec le salaire qu'ils avaient avant leur élection (règle interne au parti). Cela représente plus ou moins l'équivalent du salaire médian (3 000 euros brut par mois).
2) Pour les parlementaires en général, la rémunération légale serait de 6 000 euros bruts par mois, ce qui correspond pour un isolé à environ 3 200 euros nets. Ce montant net correspond à un peu plus de la moitié de l'indemnité actuelle d'un parlementaire.
Précisons que les fonctions parlementaires spéciales (président ou vice-président de l'assemblée, président de commission, chef de groupe, etc.) ne feraient pas l'objet d'une rémunération supplémentaire ou alors d'un supplément modéré (par exemple 10 %).
3) Les ministres et les mandataires politiques exerçant plusieurs mandats, publics ou privés, ne pourraient en aucun cas dépasser le plafond de trois fois le salaire médian, soit 9 000 euros bruts par mois. Pour un isolé, cela représente environ 4 500 euros nets, soit un peu moins de la moitié de ce que gagne un ministre actuellement (autour de 10 000 euros nets).
NB : ces dispositions sont reprises dans une proposition de loi du PTB actuellement en cours de traitement par les services de la Chambre.
Proposition 2 – Supprimer les privilèges en matière de pension
À l'occasion des différentes attaques gouvernementales contre les pensions et prépensions, dont le relèvement de l'âge de la pension à 67 ans, le PTB n'a cessé de dénoncer l’attitude « faites ce que je dis, pas ce que je fais » des parlementaires et des ministres, qui disposent d'un système particulièrement avantageux en la matière. Le Premier ministre Charles Michel, par exemple, peut prendre sa pension à 55 ans, sur base d'une carrière complète de 20 ans.
2e axe – Transparence
Proposition 3 – Publicité des rémunérations des mandats publics et privés
Pour l'instant, la loi oblige les mandataires publics à communiquer à la Cour des comptes la liste de leur mandats publics et privés en mentionnant simplement s'ils sont rémunérés ou non.
Pour le PTB, la rémunération annuelle de chaque mandat rémunéré, public comme privé, doit être communiquée à la Cour de comptes et celle-ci doit la publier sur son site internet. Il est essentiel que les mandats privés soient visés : tant au Nord du pays (Bracke-Telenet), qu'au centre (De Decker-Chodiev) ou au Sud (Moreau-Nethys), les rémunérations au cœur du scandale provenaient de mandats privés (ou d'une société privée à capitaux publics dans le cas de Nethys).
Pourtant, la publication des rémunérations des mandats privés, défendue par le PTB, est loin d'être partagée par tous les partis. Selon ce qui ressort du groupe de travail « Renouveau politique » de la Chambre, si les partis d'opposition sont partagés sur la question, les quatre partis de la majorité s'opposent comme un seul homme à la transparence du montant des mandats privés. Cela semble confirmer un bruit qui courait : la majorité se serait déjà accordé sur les propositions à accepter ou – surtout – à rejeter.
NB : ces dispositions sont reprises dans les propositions de loi n° 2327 et 2328 du PTB (23/2/2017).
Proposition 4 – Publier les patrimoines des mandataires politiques
Outre la déclaration de mandats, la loi oblige les mandataires politiques à communiquer à la Cour des comptes les éléments de leur patrimoine (immeubles, numéro des comptes bancaires, etc.) mais sous enveloppe fermée et sans mentionner leur valeur.
Pour le PTB, il est essentiel de publier le patrimoine des mandataires politiques. Ceux-ci devraient fournir les éléments valorisés de leur patrimoine à la Cour des comptes qui les publierait annuellement sur son site internet. Cette transparence est nécessaire pour prévenir des phénomènes comme la dissimulation de revenus illicites ou immoraux, les conflits d'intérêts, les délits d'initiés, la corruption. Comme il existe un lien comptable entre les revenus et le patrimoine, le contrôle de l'un et de l'autre se renforcent mutuellement : ce sont les deux facettes d'une même transparence.
Dans son dernier rapport (21/10/2016), le Groupe d’États contre la corruption (Greco, qui dépend du Conseil de l'Europe), reproche à la Belgique de n'avoir mis en œuvre nombre de ses recommandations, dont la recommandation iii, qui suggère « que le régime des déclarations inclue clairement les revenus, les divers éléments de patrimoine et une estimation de leur valeur - quelle que soit leur forme (y compris ceux détenus directement ou indirectement, en Belgique comme à l’étranger) ainsi que les éléments de passif, avec une actualisation des informations en cours de mandat. »
La France, après l'affaire Cahuzac, a mis en place un tel mécanisme de publicité des patrimoines, qui concerne les ministres, les membres de leur cabinet, les parlementaires et encore d'autres catégories de mandataires politiques.
En Belgique, le PTB est pourtant le seul parti à défendre cette proposition. Au sein du groupe de travail « Renouveau politique » de la Chambre, les autres partis se sont soit exprimés explicitement contre, soit se sont abstenus de prendre position.
NB : ces dispositions sont reprises dans les propositions de loi n° 950 et 951 du PTB (11/3/2015).
Proposition 5 – Créer une Haute autorité de la transparence politique
S'inspirant de ce qui existe au niveau de la municipalité de Barcelone, mais également de ce qui a été mis en place en France après l'affaire Cahuzac, le PTB propose la création d'une Haute autorité de la transparence et de la bonne gouvernance. Elle aurait en son sein un comité consultatif composé de représentants de la société civile et des syndicats.
Cette Haute autorité aurait les missions suivantes :
contrôler activement les instances politiques et l'administration en matière de transparence, de bonne gouvernance et d'évitement des conflits d'intérêts ;
émettre des avis aux Parlements quant à d’éventuelles améliorations ;
recueillir les plaintes anonymes des citoyens, d’organisations de la société civile et de fonctionnaires dénonçant des dysfonctionnements (mauvaise gouvernance, abus, conflits d'intérêts, corruption, etc.) ;
en cas de besoin, mener une enquête et, le cas échéant, dénoncer les faits au parquet.
Proposition 6 – Publier sur internet toute délibération d'instances publiques
Pour le PTB, la transparence implique que la population puisse être au courant de toutes les délibérations et décisions des instances publiques, tant les organes politiques que les entreprises à capitaux publics. Les comptes-rendus de leurs réunions doivent être automatiquement accessibles à tous, en particulier via leur publication sur internet. Pour toutes les instances dont les décisions concernent un nombre important de personnes, les réunions doivent pouvoir être suivies en ligne et en direct.
Proposition 7 – Publier la liste des collaborateurs des cabinets
Des situations récentes ont encore montré de potentiels conflits d'intérêts dans plusieurs cabinets de l'actuel gouvernement fédéral, notamment ceux de la ministre de l’Énergie et du ministre des Finances.
Pour le PTB, les gouvernements doivent publier et tenir à jour, sur leur site internet, la liste de tous les collaborateurs, fixes ou occasionnels, des cabinets ministériels. La liste doit préciser pour chaque collaborateur, les mandats et professions exercés au cours des cinq années précédentes.
3e axe – Évitement des conflits d'intérêts
Proposition 8 – Interdire le cumul de mandats publics et privés
De récentes affaires ont montré que plusieurs parlementaires, dont le président de la Chambre, avaient une fonction de conseiller pour la multinationale Telenet, alors qu'ils sont amenés à voter des lois relatives au secteur des télécoms ou à l'entreprise publique Proximus, concurrente de Telenet. Même un ancien Premier ministre a, durant son mandat, été lié par contrat avec Telenet.
De telles situations sont inacceptables en termes d'évitement de potentiels conflits d'intérêts. Il ne s'agit pas, bien sûr, d'empêcher qu'un dirigeant d'une PME familiale puisse être parlementaire. Il serait même souhaitable que des travailleurs salariés ou indépendants puissent combiner une activité professionnelle à temps partiels avec un mandat de parlementaire, de manière à rester en contact avec les réalités de la vie active. Il faut par contre interdire tout mandat ou contrat d'un mandataire politique avec des banques, multinationales et sociétés cotées en Bourse.
NB : ces dispositions sont reprises dans une proposition de loi du PTB actuellement en cours de traitement dans les services de la Chambre.
Proposition 9 – Combattre le phénomène des « portes tournantes »
Un autre phénomène pose problème en matière de conflits d'intérêts, celui des « portes tournantes » : ces individus qui passent successivement du monde politique au monde des affaires. Plusieurs anciens Premiers ministres belges ont suivi cette voie douteuse…
Pour le PTB, dans les cinq années suivant l'exercice d'un mandat public, le mandataire ne peut accepter de mandat (ou autres relations) avec des banques, multinationales et sociétés cotées en Bourse.
NB : ces dispositions sont reprises dans une proposition de loi du PTB actuellement en cours de traitement dans les services de la Chambre.
Autres propositions du PTB
En dehors des trois axes qui précèdent, le programme du PTB contient une série de propositions de réforme en matière de gouvernance. Ces réformes ont évidemment toute leur utilité, mais le PTB estime qu'elles sortent du cadre des mesures prioritaires à prendre pour répondre aux récents scandales. Voici deux propositions qui, tout en étant hors des trois axes, ne s'éloignent pas trop du cadre.
Proposition 10 – Interdire certains cumuls de mandats publics
Outre le décumul financier (voir proposition 6), le PTB propose un décumul fonctionnel : le mandat de député (national ou régional) ne devrait pas pouvoir être cumulé à une fonction exécutive au niveau communal (échevin ou bourgmestre). Un tel cumul pose en effet un double problème : le manque de temps consacré aux différents mandats (diriger une ville ne peut se faire à temps partiel) et le mélange de fonctions législatives et exécutives.
Par contre, le PTB défend la possibilité de continuer à exercer un emploi de travailleur, à temps partiel, à côté de sa fonction de député. S'opposant à la conception de « politiciens professionnels », le parti de gauche estime qu'un parlementaire doit avoir du temps pour être au contact de la réalité et non être enfermé dans la tour d'ivoire du Parlement.
Proposition 11 – Réduire le nombre de collaborateurs des cabinets
Le PTB constate une évolution néfaste dans laquelle les cabinets ministériels prennent de l'ampleur et recourent également de plus en plus à des consultants, au détriment du recours à l'administration. On se souvient par exemple de la polémique ayant mis en cause l'ancienne ministre Jacqueline Galant, laquelle avait fait rédiger un projet de loi par le cabinet d'avocats Clifford Chance pour un montant astronomique et un travail bâclé, tandis que, fort de son expertise, le SPF Mobilité aurait réalisé un bien meilleur travail et sans surcoût.
Le parti de gauche propose donc une réduction à la fois du nombre de collaborateurs des cabinets et du recours à des consultants.
Tentatives d'enfumage et propositions dangereuses
La transparence à la mode N-VA
La Chambre a décidé de créer un groupe de travail chargé de chercher des consensus sur des dispositions de renouveau politique qui devront être ensuite coulées en propositions de loi. Lors de la première discussion de ce groupe, sur le thème de la transparence, l'attitude de la N-VA était assez révélatrice. Elle est venue avec pas moins de sept propositions sur ce seul thème, contenant toutefois beaucoup de points périphériques et peu d'avancées sur le fond. Proposer, par exemple, que les politiciens puissent rentrer leur déclaration de mandats par voie électronique, c'est sans doute une bonne idée sur le plan pratique, mais on cherche toujours le rapport avec la transparence.
Par contre, dès qu'il s'agit de toucher le noyau dur de la transparence, la N-VA exprime une frilosité qui montre à quel point ce parti, si prompt à dénoncer les partis traditionnels, s'est déjà lui-même rangé, dans les faits, dans cette catégorie (ce que montrent d'ailleurs aussi l'affaire Bracke ou les conflits d'intérêts au cabinet du ministre Van Overtveldt). Ainsi, la N-VA, sans fournir d'argument, s'oppose partiellement à la transparence des rémunérations des mandats publics (elle veut seulement que l'on donne une fourchette de revenu), s'oppose totalement à la transparence des rémunérations dans mandats privés et est violemment allergique à la transparence sur le patrimoine des mandataires.
Comme cette peur de la transparence est partagée par la plupart des autres partis traditionnels, on peut craindre que le groupe de travail « Renouveau politique » se transforme en opération d’encommissionnement, misant sur l'amenuisement de l'émotion et de la vigilance populaires pour rendre en juillet, en pleine période de vacances, quelques timides mesures sans lien avec l'ambition affichée au départ.
L'idée antidémocratique de réduire le nombre de députés à la Chambre
S'il y a bien un parti qui a toujours dénoncé la multiplication des instances exécutives et législatives, suite aux réformes institutionnelles à répétition, qui organisent le repli des régions et communautés sur elles-mêmes au détriment de la solidarité, c'est le PTB, seule formation unitaire du champ politique belge.
Cependant, certains responsables politiques tentent de détourner le débat sur le niveau de salaires des mandataires en l'entraînant sur celui du nombre de mandataires. La ficelle est un peu grosse, mais c'est pourtant ce qu'a fait le Premier ministre Charles Michel, le 16 février dernier, dans sa réponse au député PTB Raoul Hedebouw qui, en séance plénière de la Chambre, l’interrogeait sur la culture de la cupidité du monde politique. Charles Michel : « N'y a-t-il pas dans notre pays beaucoup de ministres, beaucoup de mandataires ? Peut-être devons-nous mettre cette question de la rémunération en lien avec le nombre très élevé de fonctions politiques et de fonctions publiques ? ».
Six jours plus tard, le député libéral Vincent Van Quickenborne (Open Vld) concrétisait l'idée du Premier ministre en affirmant que la Chambre pourrait « se tenir avec cinquante collègues en moins. » Après le « moins de fonctionnaires mais mieux payés » de Nicolas Sarkozy, va-t-on bientôt assister au credo « moins de parlementaires mais mieux payés » de la droite belge ? Non seulement il s'agit d'un écran de fumée pour tenter de réduire le problème de la culture de la cupidité du monde politique à une simple question d'ordre budgétaire, mais, en plus, une telle proposition est foncièrement antidémocratique, puisqu'elle conduirait à renforcer le poids des grands partis traditionnels à la base des scandales et à empêcher l'émergence de petits partis qui pourraient menacer le ronron de leurs mauvaises pratiques.
Une Chambre de 100 députés au lieu de 150, augmenterait en effet le seuil pour obtenir un siège. Ce seuil dépasserait partout les 5 %, même dans les provinces envoyant le plus de députés à la Chambre. Et, dans une province comme le Limbourg, il faudrait pratiquement 9 % des voix pour obtenir un élu. Dans les provinces du Luxembourg ou du Brabant wallon, ce seuil dépasserait même les 20 %.
A lire sur ptb.be (04/04/2017)