Comment soutenir les librairies indépendantes face à la concurrence déloyale d’Amazon
Avec le confinement, le commerce en ligne est en pleine explosion. Une aubaine pour Amazon qui se taille la part du lion, au détriment des librairies et des petits commerces. « L’enjeu, aujourd’hui, c’est bien de demander à Amazon, FNAC et aux hypermarchés de se cantonner aux ventes de produits alimentaires » soulignent des libraires indépendants. Voici une série d’alternatives pour les soutenir.

S’il fait le malheur des uns, le confinement et le « shut down » de l’économie locale offrent une véritable opportunité pour les vendeurs en ligne qui voient leur activité fortement augmenter sous la demande, notamment depuis l’allocution d’Emmanuel Macron le 12 mars. Alors que les librairies indépendantes et les petits commerces culturels, déjà fragilisés par le pouvoir monopolistique des géants d’Internet, sont contraints de fermer pour une durée indéterminée, Amazon, numéro 1 de la vente en ligne, continue ses activités en ligne, et annonce même sur son blog la création de 100 000 emplois à temps plein et temps partiel aux États Unis pour répondre à la demande.

Pas de répit pour les travailleurs d’Amazon donc, et ce malgré la colère des employés. En effet, face au non-respect des restrictions sanitaires, et au manque de masques, de gants, et de gels hydroalcooliques dans certains entrepôts, des travailleurs font exercer leur droit de retrait, comme c’est le cas à l’entrepôt de Saran dans le Loiret [1].
« L’enjeu, aujourd’hui, c’est bien de demander à Amazon, FNAC et aux hypermarchés de se cantonner aux ventes de produits alimentaires »

Conditions de travail plus que douteuses, et concurrence déloyale, l’opportunisme d’Amazon en pleine crise de Covid-19 n’a pas échappé aux pouvoirs politiques. Le 18 mars, le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Lemaire, a annoncé qu’il examinait l’idée de rouvrir les librairies afin de contrer l’absorption du marché en ligne par le géant d’Internet, à la valeur boursière pesant déjà quelques 800 milliards de dollars.

« Sur le fond, nous le rejoignons totalement pour considérer la librairie comme un commerce de première nécessité et comptons sur son soutien afin qu’aucune librairie ne soit poussée à la fermeture par cette crise majeure », a réagi le Syndicat de la librairie française. Cependant, il indique que l’alternative n’est pas la réouverture des librairies, qui induirait d’exposer libraires et clients à la contamination. Le syndicat « ne souhaite pas répondre au risque sanitaire de la poursuite des livraisons de livres par Amazon par le risque supplémentaire qu’engendrerait une réouverture des librairies ». Il demande « que les conditions strictes imposées par le gouvernement, dont la limitation maximale des contacts, s’imposent également aux opérateurs qui continuent, comme si de rien n’était, de vendre et de livrer des produits définis comme "non indispensables" dans la période actuelle ». En clair, qu’Amazon arrête, au moins partiellement, son activité, dangereuse pour ses salariés et livreurs.

« Nous avons hâte de ré-ouvrir nos librairies et de retrouver nos clients, mais pas à n’importe quel prix », confirme le président de l’association de librairies indépendantes Initiales. « Aujourd’hui, notre priorité c’est la responsabilité et la citoyenneté. Pas les petits profits. Nous pensons bien sûr que les librairies sont des lieux essentiels pour la culture, le partage et le vivre-ensemble, mais nous ne sommes pas dupes : l’enjeu, aujourd’hui, c’est bien de demander à Amazon, FNAC et aux hypermarchés de se cantonner aux ventes de produits alimentaires ; il serait pour le moins scandaleux que le géant américain de la fraude fiscale, qui fait tout pour échapper à l’impôt et "évite" ainsi de contribuer à la solidarité nationale, profite de cette crise pour gonfler ses gains. »
Des alternatives à la consommation de masse

En France, bien que de nombreuses librairies indépendantes aient été obligées de cesser leurs activités, comme c’est le cas pour la librairie toulousaine Ombres Blanches, Recyclelivre, ou encore le portail des Librairies indépendantes, qui donne cependant toujours accès à d’autres vendeurs en ligne, d’autres alternatives responsables s’offrent aux citoyens. Basta ! vous propose d’en découvrir quelques unes.

1. Pour l’achat de livres et autres produits culturels d’occasion, la boutique Emmaüs demeure une des grandes références.

2. Les lecteurs et lectrices de BD pourront quant à eux trouver leur bonheur d’occasion sur BD Fugue.

3. Pour l’achat de livres neufs, vous pouvez vous rendre sur Place des Librairies, ou lalibrairie.com.

4. Stop Amazon vous propose des liens vers des sites de « consommation responsable ».

5. Enfin, le module Amazon Killer pour les navigateurs Chrome et Firefox vous permet de chercher un livre via le site d’Amazon et de l’acheter en librairie.

Le président de l’association de librairies indépendantes Initiales conclut qu’ils veulent bien ré-ouvrir leurs librairies, mais « dans des conditions de convivialité nous permettant de bien faire notre métier, du temps pour accueillir, conseiller, la possibilité de faire des commandes (l’essentiel de la chaîne du livre est aujourd’hui à l’arrêt), dans le souci de la santé de toutes et tous. Nos livres vous attendrons, comptez sur nous. »

Par Solani Bourébi (publié le 20/03/2020)
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