L'enseignement, cet investissement rentable qui booste le PIB
Investir dans l'enseignement pourrait augmenter le PIB de moitié d'ici 2030, d'après la dernière enquête Pisa qui fait encore état d'importantes lacunes en maths, en compréhension à l’écrit et en sciences.

En Belgique, environ 22% des élèves de 15 ans ont affiché de faibles performances dans toutes les matières qui ont fait l’objet de l’étude Pisa de 2012 (soit les mathématiques, la compréhension à l’écrit et les sciences). Un taux inférieur à la moyenne OCDE (28%), mais qui peut avoir "des conséquences à long terme sur l’économie", estime l’Organisation de coopération et de développement économique.

L’OCDE a réalisé un zoom sur ces élèves peu performants afin d’identifier les causes de cet échec de nos systèmes éducatifs, et tracer des pistes de solutions.
Premier constat: "A l’impossible nul n’est tenu." L’OCDE a en effet enclenché la machine à remonter le temps, et a constaté que neuf pays ont réussi à améliorer les résultats de leurs élèves les plus faibles entre 2003 et 2012. "Des pays qui ont peu de choses en commun pourtant (Allemagne, Mexique, Russie, Turquie entre autres), note l’OCDE, ce qui démontre que tout le monde peut y arriver, "s’il fait une priorité de la politique d’éducation, avec des ressources supplémentaires".

Et ça rapporte

Voilà pour le message d’optimisme. L’OCDE y ajoute une petite couche d’incitation: "Lutter contre les faibles résultats scolaires est peut-être onéreux mais s’avère rentable à long terme", juge l’OCDE. Les faibles niveaux de compétences limitent l’accès à l’emploi et augmentent les risques liés à la santé. À long terme, c’est la croissance économique et l’équité sociale qui trinquent.

190 milliards €

Si tous les élèves parvenaient au seuil minimum de compétence, cela pourrait multiplier par 1,5 d’ici 2030 le PIB d’un pays développé. En Belgique, on gagnerait 190 milliards.
D’après les calculs de l’organisation, les pays développés pourraient multiplier par 1,5 leur PIB d’ici 2030, si tous les élèves sans exception parvenaient à acquérir le bagage minimum de compétence. Un rapide petit passage par la calculette nous apprend donc que si la Belgique fait tomber de 22% à 0% son taux d’élèves peu performants, elle réussirait à doper son PIB de… 190 milliards d’euros.

Cela, c’est pour la théorie. Mais les facteurs qui influencent le PIB sont nombreux. Tout comme les facteurs qui font baisser la performance des élèves. Les causes de décrochage sont connues: jeunes issus de l’immigration plus exposés, méconnaissance de la langue parlée à l’école, redoublement. "Les résultats scolaires sont aussi influencés par les établissements qu’ils fréquentent", note aussi l’OCDE. Et "les ressources des écoles et les pratiques organisationnelles sont aussi liées aux faibles performances des élèves", précise l’organisation.

Quels remèdes apporter? L’OCDE suggère:
• de davantage impliquer les parents,
• de mieux répartir les ressources entre établissements,
• de donner plus de liberté aux écoles,
• de soutenir de manière précoce les élèves.
• de miser sur la mixité sociale. "Elle permet de réduire globalement le nombre d’élèves aux performances médiocres, sans pour autant que cela ait un impact négatif sur les élèves plus performants."

ZOOM: MIXITÉ SOCIALE, UNE RECETTE QUE LA BELGIQUE A TENTÉE

La démonstration est implacable: "Les élèves n’apprennent pas seulement de leurs enseignants, mais aussi de leurs pairs. Si la plupart de leurs compagnons de classe sont faibles et issus de milieux socio-économiques défavorisés, ces élèves peuvent alors avoir une scolarité plus difficile […]", dit l’OCDE en prônant dans la foulée plus de mixité sociale dans les écoles.

En Fédération Wallonie-Bruxelles, on y avait déjà pensé depuis longtemps. C’est d’ailleurs pour cela qu’a été inventé le "décret-inscription". Son premier objectif était de permettre aux moins favorisés d’avoir plus facilement accès aux écoles avec un niveau d’enseignement réputé très bon (et donc, des écoles plus huppées et très prisées).
Le décret existe déjà depuis six ans. Fin 2014, la commission de pilotage en a évalué ses effets. Un constat lapidaire: "Les effets du décret sur la mixité sociale sont ‘pelliculaires’". Malgré le décret, les élèves moins favorisés ne sont pas beaucoup plus présents dans les écoles à indice socio-économique élevé.
Le décret, lui, est toujours d’application. D’abord car les conclusions rendues à l’époque étaient "provisoires". Ensuite car le décret a quand même d’autres mérites, dont celui de mettre tous les enfants sur un pied d’égalité dans la procédure.
Pour la mixité sociale par contre, il faudra trouver une autre recette… N.B.

Par Nathalie Bamps

Lire sur le site de lecho.be (10/02/2016)