30 Mar 2020
Les effets de la Covid-19 [1] illustrent à quel point le système économique actuel nous rend fragiles. Face aux basculements écologiques en cours, cette nouvelle pandémie mondiale [2] n’est qu’un avertissement. Un avertissement dont il faut nous saisir.
En parallèle de la pandémie (partie 1), une crise financière a démarré [3]. Les détenteurs de capitaux sont en train de négocier avec les gouvernements et les « corps intermédiaires » (dont les syndicats) pour maintenir au maximum les bénéfices qu’ils avaient prévus pour 2020 et, surtout, leur modèle économique. Les contradictions inhérentes au capitalisme sont en train de nous exploser à la figure et la manière dont nous allons réagir à ce « premier » exercice grandeur nature va être déterminante pour nos avenirs.
"Nous aurions dû stopper la production non essentielle depuis la semaine dernière et mettre en place une allocation de quarantaine, sous la forme d’un impôt de crise"
Cet avenir et le présent que nous sommes en train de traverser ne sont pas vécus de la même manière par tout le monde. Les plus précaires travaillent, malgré le manque criant de moyens, pour permettre le confinement (voire la fuite temporaire) des autres. Nous aurions dû stopper la production non essentielle depuis la semaine dernière et mettre en place une allocation de quarantaine, sous la forme d’un impôt de crise (partie 2). Les oublié·e·s sont encore plus soumis·es à l’injonction de disparaître qu’en temps « normal ».
Heureusement, les solidarités et luttes en cours font toute la différence (partie 3), et elles vont déterminer à quoi ressemblera « l’après Coronavirus ». Cette expérience peut être utilisée par le pouvoir en place comme « stratégie du choc » (à l’image de ce que tente l’État français), mais elle est aussi une brèche qui pourrait chambouler nos rapports sociaux et nos rapports au reste du vivant (partie 4).
Une toute petite partie de ces mesures est déjà en court, souvent grâce au travail des mouvements sociaux. Dans les faits, une multitude d’arrangements se sont déjà installés entre « petit·e·s » gens et petites structures, sans avoir pour autant d’encadrement général. Les premiers provoquent le second.
"Préparons-nous, dès maintenant, pour s’opposer à ce nouveau bail-out collectif"
La manière dont ces mesures sont appliquées et, surtout, leur « après » sont très importants à suivre. Les gouvernements vont très probablement sortir une facture salée à la population dans quelques mois, où il s’agira pour elle de faire deux fois plus d’efforts afin de maintenir le système en place. Préparons-nous, dès maintenant, pour s’opposer à ce nouveau bail-out collectif (collectiviser les pertes après avoir privatisé les bénéfices). Une injection massive d’argent public dans de nombreuses entreprises est une des principales mesures (au-delà des sauvetages bancaires, qui ont déjà commencé) que les plus riches vont exiger. Ils vont parfois même appeler cela des « nationalisations ». « Sauver l’économie » ne signifie strictement rien, si on ne parle pas en détails de quels outils, de quelles activités, contrôlées par qui et au service de qui. Ces « nationalisations » – terme quasi extrémiste en temps normal – s’effectuent sans prendre le contrôle des outils « nationalisés », qui seront revendus à perte dès que les deniers publics leur auront rendu une santé.
Sortir du Pacte de Stabilité Européen
Quelles que soit les décisions que prendra la Commission européenne – elle a déjà annoncé qu’elle ferait des exceptions concernant les déficits publics « autorisés » – il est évident que la proposition de désobéir aux traités budgétaires est on ne peut plus pertinente. Le « Pacte de stabilité » (sic) doit être suspendu. Il ne s’agit pas de faire une nouvelle exception « ad hoc », en raison de crise sanitaire, mais plutôt de remettre en discussion ces règles européennes illégitimes.
Investir immédiatement dans les soins de santé et les autres premières lignes
"Fournir le matériel nécessaire (masques à particules, appareils respiratoires, tests)"
Immédiatement verser des primes de risque et de remerciement aux personnels de première ligne. Fournir le matériel nécessaire (masques à particules, appareils respiratoires), augmenter le nombre de dépistages, former et engager du personnel (plutôt qu’uniquement réquisitionner des étudiant·e·s…) – également pour l’entretien, la logistique et toute tâche nécessaire à la gestion de la crise. Il ne s’agit pas uniquement de faire une « avance » (à rembourser) d’1 milliard d’euros, à répartir d’ici fin avril, comme le propose la Ministre de la santé.
La santé en lutte : « L’État a failli et n’a pas produit et ne compte toujours pas fournir du matériel en suffisance pour protéger (et dépister) tout le personnel hospitalier ou extra hospitalier. La politique de rationnement expose les patient•e•s, le personnel de santé et son entourage à un risque sanitaire grave. C’est une politique dangereuse qui contribue à la propagation de la pandémie. Nous réclamons du matériel pour toutes et tous immédiatement, et ce à l’instar de plusieurs pays asiatiques qui ont réussi à endiguer l’épidémie. La situation en Chine puis celle en Italie nous avaient mis•e•s en garde : ce qui va manquer, ce sont également les respirateurs. Au plus on a de respi, au plus nous pourrons sauver des vies ! Simple. Sinon, nous serons amené•e•s à devoir faire des choix. Horribles. Pourquoi le matériel, qui est disponible puisqu’en vente par les firmes pharmaceutiques, ne peut-il pas être réquisitionné ? »
Si nous sommes confiné·e·s, profitons-en pour harceler les pouvoirs publics jusqu’à ce qu’ils prennent leurs responsabilités et répondent immédiatement à ces revendications. De plus en plus de personnes mettent des banderoles à leurs fenêtres, nous pouvons également nous prendre en photo en soutien à ces revendications.
Réquisitionner le matériel vital et plafonner les prix
Il faut réquisitionner les masques, gels désinfectants, thermomètres, appareils respiratoires, médicaments antiviraux et analgésiques, etc. (sans nécessairement prévoir de « dédommagement » au prix du marché comme le Ministre de l’intérieur le fait concernant ces 180 000 tests et réactifs). Pour la vente public, les prix doivent être plafonnés comme cela a partiellement été fait en France (cette mesure doit également être appliquée aux biens de première nécessité).
Président de CPAS : « Nous avons dû passer par une pharmacie qui a bien voulu nous dépanner pour avoir un bidon de cinq litres de solution hydroalcoolique. Nous avons été facturés à 400 euros pour cette solution. (…) le prix est passé à 300 euros pour un thermomètre. »
Médecin généraliste : « Dans nos maisons médicales, tout le monde est sur le pont depuis des jours. D’après les informations que nous recevons des hôpitaux et d’autres établissements de santé, les stocks baissent là aussi à vue d’œil. Or, certaines firmes semblent bien décidées à tirer profit de cette situation. Aujourd’hui, nous payons 70 euros un paquet de 50 masques chirurgicaux. Il y a quelques mois, le même paquet nous revenait à 6 euros. Le prix a donc plus que décuplé. »
Il faut noter les acteurs qui sont en train de spéculer sur cette pandémie et les sanctionner lourdement (voir partie 4). En attendant, des plaintes peuvent être déposées ici.
Le textile et la confection doivent également être mis à contribution pour la production de masques.
Réquisitionner plusieurs secteurs clés et interdire les brevets pharmaceutiques
En premier lieu les hôpitaux, cliniques et centres de traitement privés afin de se diriger vers un service national public de la santé avec gratuité de soins, géré par les travailleuses et travailleurs du secteur. Socialiser l’industrie pharmaceutique en la mettant au service de la population, entre autres pour généraliser l’accès aux médicaments utiles. Aujourd’hui cette industrie très lucrative ne paie presque pas d’impôts et la concurrence en son sein limite la collaboration et l’échange d’informations pour trouver un vaccin et/ou une autre médication. Nous sommes en train de perdre énormément de temps. Sans compter que cette industrie pharmaceutique à but lucratif spécule sur son accessibilité future.
Stopper le travail non essentiel
Nous aurions déjà dû le faire depuis le lundi 16 mars, en se préparant durant le week-end suivant le premier arrêté ministériel. L’inconsistance principale des mesures prises par l’État est d’appliquer un confinement pour la sphère dite privée SANS l’appliquer dans la sphère dite professionnelle, comme s’il s’agissait de deux réalités parallèles. Le deuxième arrêté ministériel ne dit rien de mieux, malgré l’épidémie qui s’étend. Nous sommes en train de répéter la même erreur que les pays qui nous ont précédé, et ce principalement pour satisfaire les intérêts d’une minorité de propriétaires des moyens de production. L’Italie vient seulement de prendre la décision ce dimanche 22 mars, mais cela reste encore incomplet puisque beaucoup de secteurs non essentiels sont encore opérationnels – au point que les syndicats envisagent la grève générale). En France, les injonctions contradictoires des autorités ont atteint le sommet du ridicule.
"appliquer un confinement pour la sphère dite privée SANS l’appliquer dans la sphère dite professionnelle, comme s’il s’agissait de deux réalités parallèles"
Les travailleurs/euses des secteurs non directement nécessaires sont réduit·e·s à se défendre entreprise par entreprise. La procédure officielle pour se plaindre est ridiculement longue, et à ce jour seule une dizaine d’entreprises ont été fermées (une centaine ont reçu un avertissement). Comme en Italie, en Espagne, aux États-Unis ou au Chili et partout dans le monde, les arrêts de travail spontanés se multiplient fort heureusement (Audi Forest, Brico Liège, Atelier SNCB Schaerbeek, Ceva…). « Nous ne sommes pas de la chair à patron ». Rentrons en contact avec ces travailleurs/euses et aidons-les à mettre la pression sur leurs directions s’ils et elles le désirent (par téléphone, e-mails, réseaux asociaux, boycott, …). Mépriser les « inconscient·e·s » qui n’appliqueraient pas assez à notre goût « les » mesures de prévention étatiques ne nous mènera pas très loin, surtout si cela nous dédouane d’acter les contradictions de ces mesures et d’agir dessus.
Pour les travailleurs/euses des secteurs essentiels [4], il faut maximiser les mesures de protection possibles (transports réduits au minimum ; distances de sécurité ; gants ; masques ; possibilités de se laver correctement et régulièrement les mains ; nettoyage régulier des surfaces communes du type poignées, boutons, tables, poubelles, wc,… ; éviter le plus possible les espaces fermés et les endroits fort fréquentés ; …). Ces mesures ne suffiront pas, et nous devons prendre la mesure de ce que toutes ces personnes sont en train de faire pour nous. Si, pour ces secteurs vitaux, la direction qui en aurait les moyens ne met pas en place ces mesures maximales de protection, il faut l’y contraindre (par une mobilisation interne et/ou un soutien externe). Les travailleuses/eurs savent mieux que personne ce qui doit être fait pour la prévention. Comme l’ont exprimé des travailleurs/euses de De Lijn :
« De Lijn s’est vanté dans la presse que les véhicules seraient nettoyés quotidiennement. Beaucoup de collègues ont entendu ça avec colère. C’est faux. Au mieux, les véhicules sont rapidement balayés. Il est impossible d’effectuer un nettoyage adéquat après toutes les économies réalisées et le manque de personnel que cela implique dans les services de soutien et les services techniques. (…) Les syndicats ont distribué des affiches aux chauffeurs de bus anversois avec le message ‘‘montez à l’arrière du bus’’ et ‘‘pas de vente de billets’’. Des rubans ont également été tendus dans les bus pour assurer qu’une distance soit respectée. Si la direction refuse de prendre soin de notre santé et de notre sécurité, à nous de le faire ! En fin de compte, la direction n’a pas eu d’autre choix que d’adopter ces mesures. Mais elle a tout d’abord refusé d’autoriser les rubans de démarcation. »
Les directives ministérielles disent (à raison) que les client·e·s de magasins doivent avoir 10m2, qu’il ne faut pas se regrouper même à l’extérieur, mais les ouvriers/ières (qui ne peuvent pas faire de télétravail) devraient se regrouper en intérieur avec une distance d’un mètre et demi permanente (ce qui est impossible) ? De qui se moque-t-on ? Beaucoup trop de secteurs non indispensables continuent encore d’être opérationnels ce lundi 23 mars. A-t-on besoin, en pleine pandémie, de produire des voitures, des électroménagers, de la publicité, de l’armement, du textile, … ?
Ouvrier d’une usine liégeoise : « Hier, ni mon permanent syndical ni le conseiller en prévention (!) de l’entreprise ni le contremaître ne m’ont pris au sérieux lorsque j’ai demandé s’il ne valait pas mieux fermer. Aujourd’hui, nous avons réussi à stopper l’usine jusqu’à nouvel ordre. S’il n’y a pas de décision collective pour toutes les entreprises non essentielles, nous allons devoir faire boule de neige en les fermant nous-mêmes. »...
Lire la suite sur le site CADTM Belgique
En parallèle de la pandémie (partie 1), une crise financière a démarré [3]. Les détenteurs de capitaux sont en train de négocier avec les gouvernements et les « corps intermédiaires » (dont les syndicats) pour maintenir au maximum les bénéfices qu’ils avaient prévus pour 2020 et, surtout, leur modèle économique. Les contradictions inhérentes au capitalisme sont en train de nous exploser à la figure et la manière dont nous allons réagir à ce « premier » exercice grandeur nature va être déterminante pour nos avenirs.
"Nous aurions dû stopper la production non essentielle depuis la semaine dernière et mettre en place une allocation de quarantaine, sous la forme d’un impôt de crise"
Cet avenir et le présent que nous sommes en train de traverser ne sont pas vécus de la même manière par tout le monde. Les plus précaires travaillent, malgré le manque criant de moyens, pour permettre le confinement (voire la fuite temporaire) des autres. Nous aurions dû stopper la production non essentielle depuis la semaine dernière et mettre en place une allocation de quarantaine, sous la forme d’un impôt de crise (partie 2). Les oublié·e·s sont encore plus soumis·es à l’injonction de disparaître qu’en temps « normal ».
Heureusement, les solidarités et luttes en cours font toute la différence (partie 3), et elles vont déterminer à quoi ressemblera « l’après Coronavirus ». Cette expérience peut être utilisée par le pouvoir en place comme « stratégie du choc » (à l’image de ce que tente l’État français), mais elle est aussi une brèche qui pourrait chambouler nos rapports sociaux et nos rapports au reste du vivant (partie 4).
Une toute petite partie de ces mesures est déjà en court, souvent grâce au travail des mouvements sociaux. Dans les faits, une multitude d’arrangements se sont déjà installés entre « petit·e·s » gens et petites structures, sans avoir pour autant d’encadrement général. Les premiers provoquent le second.
"Préparons-nous, dès maintenant, pour s’opposer à ce nouveau bail-out collectif"
La manière dont ces mesures sont appliquées et, surtout, leur « après » sont très importants à suivre. Les gouvernements vont très probablement sortir une facture salée à la population dans quelques mois, où il s’agira pour elle de faire deux fois plus d’efforts afin de maintenir le système en place. Préparons-nous, dès maintenant, pour s’opposer à ce nouveau bail-out collectif (collectiviser les pertes après avoir privatisé les bénéfices). Une injection massive d’argent public dans de nombreuses entreprises est une des principales mesures (au-delà des sauvetages bancaires, qui ont déjà commencé) que les plus riches vont exiger. Ils vont parfois même appeler cela des « nationalisations ». « Sauver l’économie » ne signifie strictement rien, si on ne parle pas en détails de quels outils, de quelles activités, contrôlées par qui et au service de qui. Ces « nationalisations » – terme quasi extrémiste en temps normal – s’effectuent sans prendre le contrôle des outils « nationalisés », qui seront revendus à perte dès que les deniers publics leur auront rendu une santé.
Sortir du Pacte de Stabilité Européen
Quelles que soit les décisions que prendra la Commission européenne – elle a déjà annoncé qu’elle ferait des exceptions concernant les déficits publics « autorisés » – il est évident que la proposition de désobéir aux traités budgétaires est on ne peut plus pertinente. Le « Pacte de stabilité » (sic) doit être suspendu. Il ne s’agit pas de faire une nouvelle exception « ad hoc », en raison de crise sanitaire, mais plutôt de remettre en discussion ces règles européennes illégitimes.
Investir immédiatement dans les soins de santé et les autres premières lignes
"Fournir le matériel nécessaire (masques à particules, appareils respiratoires, tests)"
Immédiatement verser des primes de risque et de remerciement aux personnels de première ligne. Fournir le matériel nécessaire (masques à particules, appareils respiratoires), augmenter le nombre de dépistages, former et engager du personnel (plutôt qu’uniquement réquisitionner des étudiant·e·s…) – également pour l’entretien, la logistique et toute tâche nécessaire à la gestion de la crise. Il ne s’agit pas uniquement de faire une « avance » (à rembourser) d’1 milliard d’euros, à répartir d’ici fin avril, comme le propose la Ministre de la santé.
La santé en lutte : « L’État a failli et n’a pas produit et ne compte toujours pas fournir du matériel en suffisance pour protéger (et dépister) tout le personnel hospitalier ou extra hospitalier. La politique de rationnement expose les patient•e•s, le personnel de santé et son entourage à un risque sanitaire grave. C’est une politique dangereuse qui contribue à la propagation de la pandémie. Nous réclamons du matériel pour toutes et tous immédiatement, et ce à l’instar de plusieurs pays asiatiques qui ont réussi à endiguer l’épidémie. La situation en Chine puis celle en Italie nous avaient mis•e•s en garde : ce qui va manquer, ce sont également les respirateurs. Au plus on a de respi, au plus nous pourrons sauver des vies ! Simple. Sinon, nous serons amené•e•s à devoir faire des choix. Horribles. Pourquoi le matériel, qui est disponible puisqu’en vente par les firmes pharmaceutiques, ne peut-il pas être réquisitionné ? »
Si nous sommes confiné·e·s, profitons-en pour harceler les pouvoirs publics jusqu’à ce qu’ils prennent leurs responsabilités et répondent immédiatement à ces revendications. De plus en plus de personnes mettent des banderoles à leurs fenêtres, nous pouvons également nous prendre en photo en soutien à ces revendications.
Réquisitionner le matériel vital et plafonner les prix
Il faut réquisitionner les masques, gels désinfectants, thermomètres, appareils respiratoires, médicaments antiviraux et analgésiques, etc. (sans nécessairement prévoir de « dédommagement » au prix du marché comme le Ministre de l’intérieur le fait concernant ces 180 000 tests et réactifs). Pour la vente public, les prix doivent être plafonnés comme cela a partiellement été fait en France (cette mesure doit également être appliquée aux biens de première nécessité).
Président de CPAS : « Nous avons dû passer par une pharmacie qui a bien voulu nous dépanner pour avoir un bidon de cinq litres de solution hydroalcoolique. Nous avons été facturés à 400 euros pour cette solution. (…) le prix est passé à 300 euros pour un thermomètre. »
Médecin généraliste : « Dans nos maisons médicales, tout le monde est sur le pont depuis des jours. D’après les informations que nous recevons des hôpitaux et d’autres établissements de santé, les stocks baissent là aussi à vue d’œil. Or, certaines firmes semblent bien décidées à tirer profit de cette situation. Aujourd’hui, nous payons 70 euros un paquet de 50 masques chirurgicaux. Il y a quelques mois, le même paquet nous revenait à 6 euros. Le prix a donc plus que décuplé. »
Il faut noter les acteurs qui sont en train de spéculer sur cette pandémie et les sanctionner lourdement (voir partie 4). En attendant, des plaintes peuvent être déposées ici.
Le textile et la confection doivent également être mis à contribution pour la production de masques.
Réquisitionner plusieurs secteurs clés et interdire les brevets pharmaceutiques
En premier lieu les hôpitaux, cliniques et centres de traitement privés afin de se diriger vers un service national public de la santé avec gratuité de soins, géré par les travailleuses et travailleurs du secteur. Socialiser l’industrie pharmaceutique en la mettant au service de la population, entre autres pour généraliser l’accès aux médicaments utiles. Aujourd’hui cette industrie très lucrative ne paie presque pas d’impôts et la concurrence en son sein limite la collaboration et l’échange d’informations pour trouver un vaccin et/ou une autre médication. Nous sommes en train de perdre énormément de temps. Sans compter que cette industrie pharmaceutique à but lucratif spécule sur son accessibilité future.
Stopper le travail non essentiel
Nous aurions déjà dû le faire depuis le lundi 16 mars, en se préparant durant le week-end suivant le premier arrêté ministériel. L’inconsistance principale des mesures prises par l’État est d’appliquer un confinement pour la sphère dite privée SANS l’appliquer dans la sphère dite professionnelle, comme s’il s’agissait de deux réalités parallèles. Le deuxième arrêté ministériel ne dit rien de mieux, malgré l’épidémie qui s’étend. Nous sommes en train de répéter la même erreur que les pays qui nous ont précédé, et ce principalement pour satisfaire les intérêts d’une minorité de propriétaires des moyens de production. L’Italie vient seulement de prendre la décision ce dimanche 22 mars, mais cela reste encore incomplet puisque beaucoup de secteurs non essentiels sont encore opérationnels – au point que les syndicats envisagent la grève générale). En France, les injonctions contradictoires des autorités ont atteint le sommet du ridicule.
"appliquer un confinement pour la sphère dite privée SANS l’appliquer dans la sphère dite professionnelle, comme s’il s’agissait de deux réalités parallèles"
Les travailleurs/euses des secteurs non directement nécessaires sont réduit·e·s à se défendre entreprise par entreprise. La procédure officielle pour se plaindre est ridiculement longue, et à ce jour seule une dizaine d’entreprises ont été fermées (une centaine ont reçu un avertissement). Comme en Italie, en Espagne, aux États-Unis ou au Chili et partout dans le monde, les arrêts de travail spontanés se multiplient fort heureusement (Audi Forest, Brico Liège, Atelier SNCB Schaerbeek, Ceva…). « Nous ne sommes pas de la chair à patron ». Rentrons en contact avec ces travailleurs/euses et aidons-les à mettre la pression sur leurs directions s’ils et elles le désirent (par téléphone, e-mails, réseaux asociaux, boycott, …). Mépriser les « inconscient·e·s » qui n’appliqueraient pas assez à notre goût « les » mesures de prévention étatiques ne nous mènera pas très loin, surtout si cela nous dédouane d’acter les contradictions de ces mesures et d’agir dessus.
Pour les travailleurs/euses des secteurs essentiels [4], il faut maximiser les mesures de protection possibles (transports réduits au minimum ; distances de sécurité ; gants ; masques ; possibilités de se laver correctement et régulièrement les mains ; nettoyage régulier des surfaces communes du type poignées, boutons, tables, poubelles, wc,… ; éviter le plus possible les espaces fermés et les endroits fort fréquentés ; …). Ces mesures ne suffiront pas, et nous devons prendre la mesure de ce que toutes ces personnes sont en train de faire pour nous. Si, pour ces secteurs vitaux, la direction qui en aurait les moyens ne met pas en place ces mesures maximales de protection, il faut l’y contraindre (par une mobilisation interne et/ou un soutien externe). Les travailleuses/eurs savent mieux que personne ce qui doit être fait pour la prévention. Comme l’ont exprimé des travailleurs/euses de De Lijn :
« De Lijn s’est vanté dans la presse que les véhicules seraient nettoyés quotidiennement. Beaucoup de collègues ont entendu ça avec colère. C’est faux. Au mieux, les véhicules sont rapidement balayés. Il est impossible d’effectuer un nettoyage adéquat après toutes les économies réalisées et le manque de personnel que cela implique dans les services de soutien et les services techniques. (…) Les syndicats ont distribué des affiches aux chauffeurs de bus anversois avec le message ‘‘montez à l’arrière du bus’’ et ‘‘pas de vente de billets’’. Des rubans ont également été tendus dans les bus pour assurer qu’une distance soit respectée. Si la direction refuse de prendre soin de notre santé et de notre sécurité, à nous de le faire ! En fin de compte, la direction n’a pas eu d’autre choix que d’adopter ces mesures. Mais elle a tout d’abord refusé d’autoriser les rubans de démarcation. »
Les directives ministérielles disent (à raison) que les client·e·s de magasins doivent avoir 10m2, qu’il ne faut pas se regrouper même à l’extérieur, mais les ouvriers/ières (qui ne peuvent pas faire de télétravail) devraient se regrouper en intérieur avec une distance d’un mètre et demi permanente (ce qui est impossible) ? De qui se moque-t-on ? Beaucoup trop de secteurs non indispensables continuent encore d’être opérationnels ce lundi 23 mars. A-t-on besoin, en pleine pandémie, de produire des voitures, des électroménagers, de la publicité, de l’armement, du textile, … ?
Ouvrier d’une usine liégeoise : « Hier, ni mon permanent syndical ni le conseiller en prévention (!) de l’entreprise ni le contremaître ne m’ont pris au sérieux lorsque j’ai demandé s’il ne valait pas mieux fermer. Aujourd’hui, nous avons réussi à stopper l’usine jusqu’à nouvel ordre. S’il n’y a pas de décision collective pour toutes les entreprises non essentielles, nous allons devoir faire boule de neige en les fermant nous-mêmes. »...
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