19 Jan 2021
Ils sont pour la plupart ingénieurs, travaillent à Alphabet, société mère de Google, et ont lancé lundi l’un des tous premiers syndicats de la Silicon Valley, après un an de préparation en secret. Au grand dam du géant de la tech qui a toujours maté les critiques.
De larges sourires dessinés sur les lèvres et, brandi fièrement, un logo rouge avec trois lettres, AWU, pour Alphabet Workers Union. Les photos des nouveaux syndiqués d’Alphabet, maison mère de Google, fleurissent ce lundi sur Twitter. Pendant plus d’un an, ils ont travaillé, en secret, à la création d’un tout nouveau syndicat, l’un des premiers de la Silicon Valley. Aujourd’hui, ils sont plus de 200 à signer une tribune dans le New York Times pour le dévoiler au grand public.
Alan fait partie de la liste. A 27 ans, l’ingénieur partage son excitation : «J’ai rejoint l’organisation parce que je pense que, collectivement, on peut réussir à avoir un impact.» raconte-t-il à Libération. Pendant des mois, lui et une douzaine d’autres camarades ont œuvré en toute discrétion au sein de l’entreprise, comptabilisant plus de 130 000 employés dans le monde, pour recruter des nouveaux membres : «Ça a demandé beaucoup de conversations impersonnelles, de messages privés, de SMS… Mais on n’avait pas le choix, on avait peur des représailles», nous confie-t-il.
Ces représailles, Alan et les autres employés en ont été témoins. En 2019, le géant américain vire brutalement quatre salariés, connus pour l’avoir publiquement critiqué. Aujourd’hui, il est même accusé d’avoir recours à des experts consultants pour décourager toute création de syndicat. Peu importe, Alan dit ne pas avoir eu le choix : «Avec l’agitation des dernières années, on s’est dit qu’il fallait s’organiser collectivement.»
De nombreuses tensions internes
Car, chez Alphabet et Google, les tensions internes se multiplient. En 2018, les employés lancent une pétition contre la participation du groupe au programme de recherche du Pentagone, baptisé Maven. La même année, ils manifestent contre l’octroi de grosses indemnités de départ à des dirigeants accusés de harcèlement sexuel. Le licenciement de Timnit Gebru, une chercheuse noire spécialisée sur les questions d’éthique liées à l’intelligence artificielle, provoque, en 2020, une autre levée de boucliers.
Aujourd’hui, le nouveau syndicat espère donc bien pouvoir traiter des questions de salaires, de conditions de travail, mais aussi de problématiques éthiques, informent les fondateurs dans un communiqué. «La prochaine étape c’est que le maximum d’employés nous rejoignent pour que l’on décide collectivement des points à négocier […] A l’avenir, on aimerait pouvoir collaborer avec Alphabet et Google», espère Alan.
Pas sûr, toutefois, que cette collaboration intervienne de sitôt, si l’on en croit les propos de Kara Silverstein, une dirigeante de Google : «On a toujours travaillé dur pour créer un environnement de travail favorable et enrichissant. Bien sûr, nos employés ont des droits que nous soutenons. Mais, comme nous l’avons toujours fait, on continuera de nous engager directement auprès de tous nos employés.»
Par Elise Viniacourt (publié le 05/01/2021)
A lire sur le site Libération
De larges sourires dessinés sur les lèvres et, brandi fièrement, un logo rouge avec trois lettres, AWU, pour Alphabet Workers Union. Les photos des nouveaux syndiqués d’Alphabet, maison mère de Google, fleurissent ce lundi sur Twitter. Pendant plus d’un an, ils ont travaillé, en secret, à la création d’un tout nouveau syndicat, l’un des premiers de la Silicon Valley. Aujourd’hui, ils sont plus de 200 à signer une tribune dans le New York Times pour le dévoiler au grand public.
Alan fait partie de la liste. A 27 ans, l’ingénieur partage son excitation : «J’ai rejoint l’organisation parce que je pense que, collectivement, on peut réussir à avoir un impact.» raconte-t-il à Libération. Pendant des mois, lui et une douzaine d’autres camarades ont œuvré en toute discrétion au sein de l’entreprise, comptabilisant plus de 130 000 employés dans le monde, pour recruter des nouveaux membres : «Ça a demandé beaucoup de conversations impersonnelles, de messages privés, de SMS… Mais on n’avait pas le choix, on avait peur des représailles», nous confie-t-il.
Ces représailles, Alan et les autres employés en ont été témoins. En 2019, le géant américain vire brutalement quatre salariés, connus pour l’avoir publiquement critiqué. Aujourd’hui, il est même accusé d’avoir recours à des experts consultants pour décourager toute création de syndicat. Peu importe, Alan dit ne pas avoir eu le choix : «Avec l’agitation des dernières années, on s’est dit qu’il fallait s’organiser collectivement.»
De nombreuses tensions internes
Car, chez Alphabet et Google, les tensions internes se multiplient. En 2018, les employés lancent une pétition contre la participation du groupe au programme de recherche du Pentagone, baptisé Maven. La même année, ils manifestent contre l’octroi de grosses indemnités de départ à des dirigeants accusés de harcèlement sexuel. Le licenciement de Timnit Gebru, une chercheuse noire spécialisée sur les questions d’éthique liées à l’intelligence artificielle, provoque, en 2020, une autre levée de boucliers.
Aujourd’hui, le nouveau syndicat espère donc bien pouvoir traiter des questions de salaires, de conditions de travail, mais aussi de problématiques éthiques, informent les fondateurs dans un communiqué. «La prochaine étape c’est que le maximum d’employés nous rejoignent pour que l’on décide collectivement des points à négocier […] A l’avenir, on aimerait pouvoir collaborer avec Alphabet et Google», espère Alan.
Pas sûr, toutefois, que cette collaboration intervienne de sitôt, si l’on en croit les propos de Kara Silverstein, une dirigeante de Google : «On a toujours travaillé dur pour créer un environnement de travail favorable et enrichissant. Bien sûr, nos employés ont des droits que nous soutenons. Mais, comme nous l’avons toujours fait, on continuera de nous engager directement auprès de tous nos employés.»
Par Elise Viniacourt (publié le 05/01/2021)
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